Il est vrai que la Porsche 914 a souvent eu une image bâtarde dans le monde de la collection, et pire encore, aux yeux des Porschistes.
Le mieux pour se faire une idée : l'essayer, ça tombe bien la maison Osenat en proposait une et me confiait les clés.
L'histoire de la Porsche 914
Nous voilà donc en 1969. La 911 est arrivée chez Porsche mais ce ne s'est pas fait sans soucis. Il fallait un modèle d'entrée de gamme et c'est vers la 912 qu'on s'est tourné. Quelques années plus tard, la solution miracle n'a toujours pas été trouvée.
On veut séduire les jeunes avec un modèle qui reste sportif, mais également abordable. Mais après tout l'investissement mis en place pour concevoir, produire et promouvoir la 911, Porsche ne peut assumer la conception d'un nouveau modèle seul. C'est donc à ce moment que Volkswagen, déjà intimement lié à Porsche intervient. Chez VW la Karmann-Ghia Type 34, modèle sportif de la gamme arrive en bout de course et il est temps de lui trouver un successeur. Le modèle devra être sportif, abordable et garder la touche Volkswagen. Les deux cahier des charges se rencontrent, les deux constructeurs vont s'allier pour crée la 914.
Deux modèles sont alors prévus, la 914/4 et la 914/6. La première, la 914/4 héritera d'un 2 litres VW et la 914/6 d'un plus honorable flat 6 Porsche. Toutes le 914/4 sont fabriqués chez Karmann. Pour la "6" c'est une autre histoire, Porsche se fait livrer les caisses nues à Zuffenhausen afin de les équiper des trains roulants spécifiques et du fameux 6 cylindres à plat maison.
En plus de ce mode de production "anormal", la distribution du modèle le sera aussi. Le logo (ou pas justement) apposé sur le capot changera suivant la partie du globe où se trouve l'acheteur ! Chez nous, en Europe, une marque fut même spécialement créée pour distribuer la 914 : "Volkswagen-Porsche". Mais la clientèle n'est pas dupe, la 914/4 sera assimilée à une Volkswagen car la carte grise de celle ci porte la mention VW type 47 alors que la 914/6 elle est bien une Porsche. Aux Etats-Unis la 914 sera bien commercialisée sous le nom Porsche, que ce soit la 4 ou la 6 cylindres, pour ne pas ternir la réputation de la marque sur ce marché primordial. C'est d'ailleurs aux US que la petite 914 aura le plus de succès car en Europe elle n'a pas su convaincre.
Pour vous donner quelques chiffres, jusqu'en 1976 et l'arrêt de production, la 914/4 s'est vendue à 115.000 exemplaires et la 914/6 à 3500 unités. Des chiffres qui peuvent paraître faibles mais à l'époque, c'est la voiture à moteur central la plus vendue ! Et puis c'est beaucoup mieux que la Type 34 !
Notre Porsche 914 du jour
Aujourd'hui j'ai, pour mon second essai, droit a une Porsche 914 de 1973 d'un bleu éclatant qui fleure bien les années 70. Une auto en très bon état et à l'historique reconnu qu'Osenat allait proposer à la vente quelques jours plus tard.
J'approche l'auto avec des a-priori plein la tête. Les Porsche, de base, c'est pas mon truc, encore moins la 914 et surtout en version 4 cylindres. Je vais donc mettre tout ça de coté pour essayer d'être objectif.
De prime abord elle a une bonne bouille cette Porsche 914 ! D'entrée la couleur m'attire et me fais me rapprocher de l'auto. Une fois à coté je découvre une carrosserie aux lignes plutôt anguleuses qui me rappelle bien que la 914 a été conçue pour ne pas ressembler à une Porsche.
Elle ressemble plus a une Fiat X1/9 qu'à une 911. Ce coup de crayon on le doit à un certain Heinrich Klie, gagnant du concours interne organisé par le bureau du design Porsche pour définir le style du nouveau modèle.
Je n'ose même pas imaginer à quoi ressemblaient les autres !
Bref, continuons malgré ces lignes atypiques, qui ne plaisent pas aux puristes de la marque. Quelques détails attirent mon attention, déjà les jantes ne me disent rien. Normal ce sont des Campagnolo (monte optionnelle d'époque). Ensuite, bien intégrées dans le massif pare-choc avant, de petites grilles chromées entourent des phares longue-portée ronds.
Tant qu'on est à l'avant est-il nécessaire de parler des phares ? Allez, on va faire vite, les phares rétractables, dans les 70's, c'était le top du top, normal que notre petite Porsche en bénéficie ! Par contre, a l'inverse de ceux de la Lotus Elan +2 ceux-ci sont commandés électriquement et pas par un système pneumatique.
Pour l'arrière ça va être bref, c'est plat, un gros pare-choc noir comme à l'avant, des petits feux fins... Voilà, je vous avais prévenus, c'était bref.
Le profil de l'auto, quand à lui, est déjà plus intéressant avec son toit Targa et sa bande Porsche qui va d'un bout a l'autre de la voiture. Dans l'ensemble la carrosserie de la 914 est harmonieuse... mais pas très excitante.
À l'intérieur
Passons a l'intérieur de la 914. C'est d'une sobriété toute germanique que brille l'intérieur de notre Porsche. Tout ou presque est noir ou gris, à l'exception d'un petit logo "914" couleur caisse collé sur la droite de la planche de bord, pour bien rappeler au passager dans quoi il est assis.
Cependant le tout a l'air plutôt de bonne qualité et bien assemblé. Première chose qui me frappe à bord se sont les petits manomètre implantés dans la console centrale devant le levier de vitesse, juste sous les yeux du conducteur. Ensuite le gros compte-tours central typique de Porsche est présent dans notre Porsche 914. Comme sur une "grande" !
Au volant de la Porsche 914
Ne serait-il pas temps de prendre le volant de la Porsche 914 ? Alleez, en route !
Ça y est, je suis assis au volant d'une Porsche pour la première fois. En fait la première impression est très neutre. Mouais. Je tourne la tête vers le levier de vitesse, et là, je vois que la grille est inversée. C'est tout bête mas, là, je commence a ressentir quelque chose. L'intérieur est spacieux, spartiate mais spacieux. Les sièges ont vraiment l'air minuscules mais on y est finalement bien assis.
Bon, point mort, il est temps de mettre le contact et de donner vie au flat 4 de 2 litres de cylindrée. Sympa le bruit de cette coccin...oups Porsche 914. Aller j'arrête de dire des bêtises, je ferme la porte 1ère et, ah non c'est la 2eme ça. Je recommence, cette fois première et c'est parti. Je trouve assez facilement le point de patinage malgré une position de conduite plutôt inhabituelle pour moi qui suis plus habitué aux grosses berlines allemandes.
On est assis très bas, les jambes presque allongées et le dos bien droit. Après quelques kilomètres au volant, la grille inversée n'est plus un problème. Cependant, je reste méfiant au moment de lâcher l'embrayage car le guidage est très aléatoire, du fait que le levier soit très lâche. Dommage qu'il n'y ait pas de ressort pour aider à identifier le point mort. La boîte est plutôt bien étagée et aide bien aux reprises.
Sinon, ça fait déjà quelques kilométrés que je roule et à allure modérée la 914 se montre très souple et agréable bien que l'amortissement soit plutôt dur. Une fois sorti de la ville la 914 se révèle plaisante à conduire et la prise en main se fait naturellement.
Du coup il est temps de hausser un peu le rythme. Et la c'est le drame. Arrivé à 5000 tours le moteur s'essouffle. C'est pas grave, toujours avec précaution, je rentre la 3 puis la 4 ça verrouille fort ! J'aime ! C'est que sa décolle même! En même temps, 110 chevaux dans à peine 950kg, ça ne pouvais que bien marcher.
À l'horizon se dessine une courbe, je freine tôt, ça freine pas mal même si l'attaque de la pédale est un peut molle. Je lâche les frein pour inscrire la 914 dans la courbe, c'est précis, pas de mauvaises sensation dans le volant, je remet doucement les gaz, la 914 pivote et prend le virage sans s'effondrer. Elle commence a me plaire finalement cette coccin...Porsche 914 ! Décidément je n'y arrive pas, ce bruit de coccinelle est vraiment désappointant comparé au comportement de la voiture.
Pour résumer un peu le comportement de la 914, elle est douce à rythme coulé mais sait se montrer incisive quand on lui demande. C'est agréable malgré ce bruit quelconque qui vient gâcher la fête.
Conclusion
Pour moi, elle ne partait pas gagnante la Porsche 914 avec son 2l. Mais elle a su casser certains a-priori que j'avais sur elle. Pour le comportement je me suis laissé agréablement surprendre par une direction très douce et un moteur qui accepte très bien les bas régimes. Mieux que les hauts régimes d'ailleurs. Ensuite la boite à grille inversée peut faire peur, mais cinq minutes au volant et vous voila prêt pour le départ d'une course !
En bref je dirais que si vous cherchez à prendre des sensations sympas, et que vous avez un peut de budget tout de même, mais que vous n'êtes pas Ari Vatanen, la Porsche 914 est faite pour vous.
S'offrir une Porsche 914
Acheter une Porsche 914, ce n'est pas comme une 911... sauf si vous en voulez le moteur. Les 914/6 sont plus rares, plus performantes et mieux vues de la plupart des aficionados. Du coup le prix s'en ressent et va chercher dans les 80.000 €. En même temps, un bon châssis, un moteur qui n'a rien à prouver et une disposition de celui-ci en position centrale, les ingrédients sont réunis !
Pour les versions 4 cylindres, il y a plus de choix. En fait trois versions ont existé. D'abord la 1.7 des débuts, produite jusqu'en 73 et qui va chercher dans les 20.000 €. Un poil plus chère la 1.8, jamais vendue en France, rare en européenne et donc pas facile à trouver.
Reste la 914/2, celle de notre essai. Le 4 cylindres est un 2 litres et c'est un bon compromis. Comme pour les autres versions, il ne faudra pas rechigner à acheter une version US car les différence sont minimes... prix mis à part. Là le prix ira chercher dans les 30.000 € pour une belle auto.
Pour ce qui est des précautions, comme souvent : gare aux longerons. Non-traités à l'intérieur ils sont un nid à rouille. Du coup si l'auto ne peut pas être levée avec un cric, c'est mauvais signe.
Pour les pièces, il faudra faire attention. Certaines sont d'origine 911. Et là c'est la cata car le vendeur de pièces ne fera pas de distinction, elle seront facturées à prix d'or.
Merci à Osenat qui proposait cette auto lors de sa vente de Juin.
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